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Faites du bruit pour la rénovation acoustique !

04 Février 2025
rénovation acoustique

Cinov Giac, le syndicat des ingénieurs acousticiens vient de publier une tribune pour rappeler une évidence souvent reléguée au second plan : la transition écologique ne se limite pas à la réduction des émissions de carbone. Elle doit aussi intégrer une dimension essentielle à notre bien-être et à celui de la biodiversité : la qualité de notre environnement sonore.
Voici la tribune de Nicolas Lounis, Président de Cinov GIAc, syndicat des ingénieurs-conseils, des bureaux d’études et des indépendants spécialisés en acoustique dans les secteurs du bâtiment, de l’environnement, de l’industrie, de la formation et de la recherche, adhérent de la Fédération Cinov, organisation patronale représentative de la branche BETIC (bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs-conseils et sociétés de conseil).

L’acoustique, un enjeu oublié de la transition écologique

Alors que la 22e édition de la Semaine du son de l’UNESCO, dédié au thème « Son et politiques », débute le 20 janvier prochain, notre attention doit se porter sur les initiatives visant à rendre nos sociétés plus respectueuses et enthousiastes pour un environnement partagé. Dans ce contexte, la rénovation énergétique des bâtiments apparaît comme un enjeu essentiel. En améliorant l’efficacité énergétique de nos infrastructures, nous pouvons réduire notre empreinte carbone tout en offrant un meilleur confort de vie.

Cependant, dans cette réflexion sur l’amélioration de nos bâtiments, un aspect, pourtant crucial, semble résonner bien moins qu’il ne le pourrait : la gestion des nuisances sonores. En effet, à l'heure où la transition énergétique doit s’accélérer, l’acoustique mérite elle aussi une attention particulière, tant elle peut favoriser notre bien-être au quotidien ainsi que la biodiversité.

La transition écologique ne se limite pas à la réduction de notre empreinte carbone. Elle implique l’amélioration de l’environnement dans son acception la plus large, et, là-dedans est inclus l’environnement sonore. Chaque jour, dans nos oreilles, bruits et sons se confrontent. Et le bruit est un véritable fléau pour la société, dont le coût social est évalué à quelque 150 milliards d’euros par an en France (chaque année !). À titre comparatif, le coût pour la société de la mauvaise qualité de l’air intérieur est estimé à 100 milliards d’euros annuels. L’air a beau être silencieux, on en entend beaucoup parler, alors que la gestion et le coût social du bruit font l’objet d’un silence assez assourdissant.

Les conséquences du bruit sur la santé humaine sont bien documentées : stress, troubles du sommeil, maladies cardiovasculaires, baisse de la productivité, et même troubles cognitifs chez les enfants et plus largement les apprenants. La maîtrise des sons qui nous entourent est une condition essentielle pour le bien-être de chacun. C’est d’ailleurs pour tenir compte de tous ces éléments-là qu’il existe un corpus de règles dédiées à la maîtrise des nuisances sonores, notamment dans secteur du bâtiment, que l’on soit dans le cadre de la construction ou de la rénovation. C’est aussi pour cela que l’intervention de l’acousticien dans un projet apporte, à ceux qui évolueront dans ces bâtiments (pour y travailler ou y vivre), un juste équilibre entre les sons utiles et les bruits dérangeants, les sons du dehors et ceux du dedans, ce juste équilibre qui assure que ces sons ne deviennent pas d’affreux bruits.
 

La biodiversité touchée

Mais l’impact des nuisances sonores ne se limite pas à la santé des humains. Il affecte également la biodiversité, ce tissu vivant dont nous dépendons tous.

Si la biodiversité, attribut indispensable de la vie humaine, enrichit notre quotidien et garantit l’équilibre des écosystèmes, elle se trouve gravement perturbée par le bruit. Les animaux, qu’ils soient terrestres ou marins, sont désorientés par les nuisances sonores, qui bouleversent leurs habitudes de migration, d’accouplement et de recherche de nourriture. Les oiseaux, par exemple, modifient leurs chants pour s’adapter au bruit ambiant, ce qui peut entraîner des difficultés dans la communication intra-espèces et affecter leur reproduction. Les mammifères marins, eux, sont victimes des bruits sous-marins générés par les activités humaines, comme le transport maritime et l’exploitation pétrolière, compromettant leur survie.

Malgré ces enjeux cruciaux, la réglementation en matière de nuisances sonores et d’atteinte à la biodiversité reste largement insuffisante. Si un travail réglementaire est en gestation en ce qui concerne la vie aquatique et les nuisances sonores provoquées par les humains, la vie terrestre, elle, est la grande oubliée.

Tandis que les normes énergétiques évoluent et se renforcent, en lien direct avec l’impact de l’énergie sur la biodiversité et la recherche de moyens pour ne pas l’abîmer, celles qui concernent l’acoustique stagnent. Il est pourtant indispensable de développer une approche holistique qui intègre à la fois l’efficacité énergétique et la qualité acoustique des bâtiments et des lieux de vie. Les politiques publiques doivent inclure des directives claires et ambitieuses sur la réduction du bruit, tant dans les environnements urbains que ruraux, et surtout inciter à la recherche d’une qualité des ambiances sonores.

Le bruit et les nuisances sonores doivent être considérés comme un enjeu environnemental à part entière. En plus d’améliorer notre qualité de vie, la réduction des nuisances sonores ne saurait que contribuer à la préservation de notre patrimoine naturel, si précieux pour sa richesse et pour notre existence humaine. Nous devons éduquer et sensibiliser sur l’importance de l’acoustique, et promouvoir des pratiques respectueuses de l’environnement sonore.

La transition écologique et énergétique doit inclure la gestion des nuisances sonores pour être complète. La rénovation acoustique doit être intégrée à tous les projets de rénovation énergétique pour construire un avenir où le bruit devient son, et donc un élément harmonieux de notre quotidien. Pour le bien-être des humains et la protection de la biodiversité et donc pour reconstruire un monde plus durable, passons du bruit au son !