Alors qu’est débattu en ce moment à l’Assemblée nationale le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dit projet de loi « Climat et résilience »), le syndicat CINOV GIAc – qui regroupe les ingénieurs-conseils et les bureaux d’études indépendants spécialisés en acoustique dans les secteurs du bâtiment, de l’environnement et de l’industrie – déplore l’absence totale de prise en compte de la lutte contre la pollution sonore dans ce projet de loi et appelle à y intégrer urgemment l’isolation acoustique, afin de lutter efficacement contre les effets néfastes du bruit sur la santé humaine, sur l’environnement et sur la biodiversité.
L’isolation phonique : un enjeu majeur pour lutter contre la mauvaise qualité de l’environnement sonore
CINOV GIAc constate que les amendements portant sur l’isolation acoustique, déposés dans le cadre du premier débat, ont été jugés irrecevables au motif qu’ils étaient « sans lien apparent avec l’objet du texte ». A contrario, CINOV GIAc considère que la pollution sonore est un enjeu majeur au vu de son caractère délétère, tant pour la santé humaine que pour la biodiversité et l’environnement, et qu’à ce titre elle devrait faire partie, comme la qualité de l’air intérieur, du volet « Habiter mieux » du projet de loi.
En effet, selon une étude publiée en 2016 par l’ADEME, le coût de la mauvaise qualité de l’environnement sonore pour les Français était estimé à 57 milliards d’euros par an. Selon une autre étude de l’ADEME en cours de réalisation et qui devrait paraître prochainement, ce « coût social » serait en fait plus proche des 100 milliards d’euros par an en France. Par ailleurs, dans le cadre du plan de relance gouvernemental, le Conseil National du Bruit avait émis le 5 octobre dernier un avis, avec plusieurs propositions pour prendre en compte le volet acoustique dans les opérations de rénovation énergétique des bâtiments.
Le bruit a des conséquences triples : économiques, environnementales et sanitaires
Rejoignant l’avis du Conseil National du Bruit, CINOV GIAc appelle les législateurs à se saisir de l’opportunité que constitue ce projet de loi – qui contient de nombreuses avancées favorisant l’accélération de la rénovation énergétique des bâtiments – pour y intégrer un volet portant sur l’isolation phonique et la lutte contre la mauvaise qualité de l’environnement sonore. En effet, selon Jean-Paul Van Cuyck, président de CINOV GIAc, « une grande partie du coût social du bruit en France provient directement de la mauvaise qualité du bâti existant, le parc immobilier construit il y a plusieurs décennies n’étant aujourd’hui plus adapté à l’exposition au bruit – qu’il provienne des transports, de l’étalement urbain ou du voisinage. »
Repenser la résilience pour intégrer toutes ses dimensions
Jean-Paul Van Cuyck considère par ailleurs que « la crise sanitaire a démontré que la résilience affecte nos modes de vie et de travail, avec la nécessité d’adapter le bâti dans l’ensemble de ses fonctions – pas uniquement thermique – aux nouveaux usages. La résilience climatique induit donc une adaptation non seulement du bâti, mais également de la manière d’appréhender l’urbanisation, les transports et la société dans son ensemble. » Quelle que soit l’origine du bruit (transports, voisinage, milieu professionnel, loisirs…), celui-ci est susceptible d’engendrer des conséquences néfastes pour la santé et pour la biodiversité. En effet, selon le président de CINOV GIAc, « nous avons pu constater, durant le confinement, que lorsqu’il y a moins de bruit, la nature reprend ses droits. Davantage de présence au domicile, à cause du télétravail notamment, génère davantage de situations de troubles de voisinage, d’autant que l’impact du bruit des espaces extérieurs est réduit. » Outre les effets bien connus sur l’audition lors de niveaux élevés d’exposition au bruit, on constate des effets extra-auditifs (perte de concentration, stress, troubles du sommeil, détérioration du système nerveux…). Ainsi, constate Jean-Paul Van Cuyck, « les enjeux d’une prise en compte de l’acoustique dans les travaux de rénovation du bâtiment sont non seulement économiques et environnementaux, mais ils constituent également un impératif sanitaire. »
Bruit, qualité de l’air et économies d’énergie : des synergies à ne pas rater
Selon René Gamba, président de la commission technique du CNB, « non seulement les logements les plus énergivores sont aussi les moins bien classés en qualité acoustique, mais de surcroit les travaux à mettre en œuvre pour améliorer les scores dans chacun des trois domaines (acoustique, qualité de l’air et énergie) bénéficient pour partie aux deux autres. Finalement, en traitant les trois sujets en même temps, on ne multiplie pas la facture par trois, loin s’en faut ! »
Les propositions de CINOV GIAc
Dans ce contexte, CINOV GIAc juge indispensable, d’une part, d’instaurer un diagnostic acoustique – qui permettra à chacun de mieux situer la qualité acoustique d’un logement, aussi bien au moment d’une vente que d’une rénovation lourde – et d’autre part de faire en sorte que les travaux de rénovation lourde ne soient pas à l’origine d’une dégradation de la qualité acoustique initiale des logements rénovés.