Les Agit'Acteurs : 4e édition - Juin 2025

Une IA responsable, éthique et humaine : utopie ou transformation en marche ?

Le 4 juin 2025, à l’occasion de la Convention annuelle de la Fédération Cinov, la 4e édition des Agit’Acteurs a réuni chercheurs, dirigeants, experts et professionnels autour d’un thème brûlant : l’intelligence artificielle, entre innovation et responsabilité.

Dans un monde où les technologies évoluent plus vite que les repères, cette matinée a permis d’ouvrir un dialogue riche et lucide autour de l’IA générative, de ses usages réels, de son impact environnemental et de ses implications sociales, politiques et culturelles. Retour sur les temps forts.

• Keynote de Luc Julia – « L’IA, ce qu’elle fait, ce qu’elle ne fait pas »

Co-créateur de Siri, Chief AI Officer chez Ampere (Renault) et membre de l’Académie des technologies, Luc Julia a ouvert cette édition avec une intervention aussi accessible que percutante.

Deux ans après sa première prise de parole dans le cadre des Agit’Acteurs, il dresse un constat sans appel :

L’IA générative est partout… mais pas toujours utilisée à bon escient.
Elle fait gagner du temps, oui, mais à un coût environnemental disproportionné.
Ce n’est pas une technologie magique : elle reste statistique, probabiliste, perfectible.

Ce que Luc Julia interroge surtout, c’est la valeur réelle de l’usage : utilisons-nous l’IA pour enrichir nos actions ou pour reproduire à grande échelle des réponses convenues ? L’accessibilité croissante des IA génératives pousse à s’équiper… sans toujours se poser les bonnes questions.

• Table ronde – « IA : danger ou opportunité ? »

Animée par Stéphane Jobert, cette table ronde a réuni trois intervenants complémentaires pour explorer les multiples facettes de l’IA au prisme de la RSE, de la souveraineté et du service.

Bernard Benhamou, Secrétaire général de l’Institut de la Souveraineté Numérique

Il a livré une analyse géopolitique puissante des enjeux liés à l’intelligence artificielle. Pour lui, l’IA n’est pas une innovation neutre : elle bouleverse notre rapport à la vérité, facilite les manipulations algorithmiques et fragilise les équilibres démocratiques.

« L’IA, c’est la politique par d’autres moyens. »

Il met en garde contre trois risques majeurs : la surveillance de masse, l’influence sur les opinions publiques et la dépendance stratégique vis-à-vis des géants technologiques extra-européens. Face à cette situation, il appelle l’Europe à dépasser la seule logique de régulation. Il plaide pour une véritable politique industrielle qui permette de faire émerger des acteurs technologiques souverains, porteurs d’une vision européenne de l’IA : transparente, éthique et démocratique. Faute de quoi, l’Europe pourrait devenir une colonie numérique des puissances américaines ou chinoises.

Élise Savarese, Directrice Data et IA chez Harmonie Mutuelle

Représentant le monde mutualiste, elle décrit une stratégie d’intégration de l’IA pragmatique et mesurée :
L’IA n’est utilisée que si elle apporte une vraie valeur.
Elle ne doit pas standardiser les réponses, ni effacer le lien humain.
Une calculette d’impact écologique est en test pour guider les choix technologiques.
La formation à l’art du prompt, la pédagogie, la réassurance des équipes sont au cœur du dispositif.

« L’intelligence, la vraie, c’est nous. L’IA doit nous aider à faire mieux, pas nous remplacer. »

Elle souligne aussi que l’IA, bien utilisée, peut renforcer la relation adhérent, fluidifier les échanges et rendre plus accessibles les informations dans un métier devenu de plus en plus complexe.

Julien Mercier – Vice-Président à L'innovation à la Fédération Cinov

Il porte la voix des TPE et PME du secteur.

Son message : oui à l’IA, mais à condition qu’elle s’ancre dans la réalité des métiers, qu’elle respecte les valeurs du conseil et de l’ingénierie, et qu’elle s’accompagne d’une formation massive.

La Fédération agit pour outiller les entreprises avec des guides, des ateliers, des dispositifs de montée en compétence, en particulier pour permettre aux petites structures de ne pas subir la vague technologique, mais de la piloter.

• Conclusion : Pour une IA alignée avec le progrès humain

Cette 4e édition des Agit’Acteurs a permis de faire émerger une conviction forte : Il ne suffit plus d’innover. Il faut innover de manière responsable, éclairée, collective.

IA et RSE ne sont pas deux mondes parallèles : ce sont les deux faces d’un même défi. C’est en croisant les regards – politiques, mutualistes, économiques – que l’on construit les conditions d’une IA éthique, sobre, utile et humaine.